Le Collectionneur

UNE PORTE S’OUVRE.

Un homme dépose au sol une jeune femme à demi inconsciente, balbutie quelques excuses et quitte la pièce en prenant soin de fermer la porte à clef. Lui, c’est Frédérick Clegg, employé de mairie et entomologiste à ses heures, respectueux, poli, et qui semble presque inoffensif et touchant. Il aime en secret depuis longtemps Miranda, jeune étudiante, celle qu’il vient d’enlever dans le but de s’en faire connaître, voire aimer. C’est le début de ce huis clos à suspense... Très vite se posent des questions : que lui veut-il ? Est-il dangereux ? Et elle, comment va-t-elle réagir ? N’est-elle pas trop sûre de ses charmes ? Au fil des jours de détention, leur relation évolue vers une fin glaçante que nul ne peut entrevoir.

C'est à la lecture du roman de John Fowles, il y a une dizaine d'années, que Thierry Jahn a proposé à l'équipe artistique l'idée de présenter une adaptation du Collectionneur. Ce projet fut ensuite mis de côté pendant plusieurs années, au cours desquelles la compagnie s'est consacrée à la création d'autres spectacles (Les caves du Vatican en 2007, le Prince travesti de Marivaux en 2010, Les contes du chat perché en 2011 et enfin Zone rouge en 2013). Ce n'est qu'à la fin de l'année 2013, qu'une adaptation du Collectionneur d'après le roman a été soumise à l'éditeur anglais, et que des lectures ont été organisées. 54 représentations se sont ensuite programmées au Théâtre du Lucernaire à Paris de novembre 2014 au 1er février 2015. Les retours du public, ainsi que les articles de presse nous poussent alors à rechercher un théâtre à Avignon pour présenter le spectacle pendant le festival. Ce sera finalement au Théâtre Buffon à 21h30 que nous jouerons Le Collectionneur. Nous bénéficions pour ce projet d'une aide de 2500 euros du Conseil Général de l'Aisne, par ailleurs la compagnie engage une grande partie de ses fonds propres, mais même une fois ajoutées les recettes de billetterie il semble illusoire de couvrir l'ensemble des charges de l'opération.

Nous lançons cet appel à dons pour vous proposer de participer à notre aventure ! Vos dons nous permettront de limiter les pertes et de donner une longue vie future au Collectionneur.

Le texte aborde plusieurs thèmes essentiels et traite du rapport amoureux unilatéral et de la négation de l’autre, il pose la question de ce qu’est la liberté (lequel des deux personnages est finalement le plus prisonnier ?), ou encore il aborde le sujet de l’inégalité des chances face au savoir et à la culture. John Fowles, dans une démarche qui peut faire penser à celle utilisée par Marivaux dans La dispute, isole les personnages de son roman de toutes interactions avec le monde extérieur, afin de reproduire les conditions d’une expérience psychologique. La séquestration, Le huis-clos, permettent un effet de loupe, pour aborder plusieurs thèmes essentiels du rapport entre l’homme et la femme.

Le plus troublant dans ce face-à-face est que l'empathie du public ne se trouve pas toujours du côté de la victime, La cruauté de la situation ne peut nous apparaître sans ambiguïté que dans le dénouement final, et c’est là, la troublante conséquence du comportement de Clegg. Il est attentionné, parfois enjoué, incompris. « Ces intentions sont bonnes » cherche-t-il à nous convaincre, et nous sommes tout prêts à le considérer lui aussi comme une victime. Il nous importe de préserver cette ambiguïté, et de livrer au public une histoire dans lesquels les cartes sont brouillées. L'ironie n'est elle pas la caractéristique essentielle du postmodernisme, dont se réclamait l'auteur. Plus généralement, on peut considérer que là où le modernisme place l'auteur et la création au centre de son esthétique, le postmodernisme fait jouer ce rôle à l'interprétation et au public. Ce décalage ironique qui assume tout aussi bien le fait de déplaire, ou d'irriter.