La Passion selon saint Matthieu de Bach

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Thibault Lam Quang,

Directeur Musical des Temperamens Variations

présente le projet

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La Passion selon saint Matthieu est un sommet ... Pourquoi l'aborder cette année avec votre ensemble?

Avec Les Temperamens Variations, nous avons beaucoup pratiqué le répertoire baroque allemand et en particulier la musique de Heinrich Schütz et celle de Jean-Sébastien Bach. De ce dernier, nous avons successivement travaillé et donné en concert les sept motets avec continuo (2008-2015), puis les six cantates de l’Oratorio de Noël (depuis 2014), la Passion selon saint Jean (2016) et la Messe en si (2018). Comment, alors, ne pas penser à la Passion selon saint Matthieu, son œuvre la plus vaste ? Grâce à la stabilité des membres du chœur, un travail de fond a pu être mené tout au long de ces années et il était clair pour moi que le chœur était prêt pour la Saint Matthieu.

Le mécénat de Bosch France permettait de financer une partie du projet: une raison déterminante pour nous lancer!

Comment avez-vous approché l'œuvre avec les chanteurs des Temperamens Variations? Comment pourriez-vous caractériser le son que vous recherchez?

J’ai voulu travailler très rapidement afin que les chanteurs du chœur puissent cerner, puis « digérer » cette œuvre immense et impressionnante. Début février, toutes les parties de cette œuvre ont été « montées » et nous allons avoir du temps jusqu’au 9 avril prochain pour en maîtriser les difficultés vocales et essayer d’en saisir toutes les nuances expressives. En effet, ce qui est particulièrement difficile pour le chœur, c’est de jouer tous les différents « rôles » que Bach lui a attribués. C’est pourquoi je recherche un son riche, souple et précis, apte à incarner tous ces « affects ».

Ce concert sera aussi l'occasion de collaborer pour la première fois avec la Maîtrise de Paris. Comment intervient-elle dans l'œuvre?

C’est la première fois que nous collaborons avec un chœur d’enfants. La cheffe de chœur de la Maîtrise de Paris (ensemble des plus jeunes enfants) chante aux Temperamens Variations, il était naturel de lui proposer ce projet. Dans la Passion selon saint Matthieu, le chœur d’enfants intervient dans le premier et le dernier chœur de la première partie de l’œuvre. A vrai dire, du temps de Bach, c’étaient des enfants qui chantaient toutes les parties de soprano et d’alto dans les chœurs. Depuis que des femmes chantent ces parties, il est d’usage de confier le choral du chœur d’entrée à des enfants, et de leur faire chanter à l’unisson des sopranos adultes celui qui clôt la première partie.

Avec une équipe de chanteurs solistes venant d'outre-Rhin, la dimension franco-allemande est une autre caractéristique de ce projet. En quoi est-ce important pour vous?

Depuis 2014, nous avons lancé une tradition d’Oratorio de Noël de JS Bach à l’église allemande de Paris et en collaboration avec le service culturel de l’ambassade d’Allemagne à Paris. Dans le cadre de ce projet, nous invitons régulièrement des chanteurs venus d’outre-Rhin et nous apprécions particulièrement cet échange qui nous permet d’apprendre à leur contact, tout en leur donnant la possibilité de se présenter au public parisien qui les accueille toujours chaleureusement.

En tant que chef, quelles sont les interprétations de l'œuvre qui vous inspirent? qui vous nourrissent ?

A vrai dire, aucune interprétation de cette œuvre ne m’inspire dans mon travail actuel. Je construis la nôtre sur l’acquis du travail de la musique de Bach de ces quinze dernières années et avec notre propre palette sonore, que j’essaie également d’adapter à ma conception de cette œuvre qui s’élabore en suivant le sens du texte. Mon principal souci, après avoir réglé les questions liées au texte, à la justesse, à l’équilibre de la polyphonie, est de rendre cette œuvre vivante et sensible. Ce n’est pas simple, par exemple, d’exprimer la moquerie contenue dans le texte quand la musique semblerait vouloir être tout simplement « belle ». Ou de différencier chacun des chorals dans son énergie, son rôle. Il y a tellement de sentiments et situations contrastés à exprimer dans cette partition.

Et si vous deviez évoquer la Saint Matthieu non plus en termes musicaux mais plutôt grâce à des images, quelles sont celles qui vous viennent à l'esprit?

Mon approche de la musique ne passe généralement que très peu par les images. Celles-ci ne me viennent que ponctuellement quand je fais travailler le chœur, afin de lui rendre plus palpable une nuance, une qualité de son que je souhaite obtenir. Avec la musique vocale, il y a déjà un texte à faire vivre et à rendre sensible par les sons. Il m’est vriament impossible de réduire cette Passion selon saint Matthieu à une image tant elle est riche, contrastée. Celle que j’ai choisie pour le visuel du projet, l’une des versions de la scène de la crucifixion gravées par Rembrandt, est la seule qui me semble pouvoir traduire visuellement l’intensité de cette œuvre incroyable.