FRAICHE

Un film de Marie-Julie Baup

Avec Pascale Arbillot et Tchéky Karyo.

Anne, cinquante-huit-ans, a une vie établie avec son émission littéraire, son mari
et son fils déjà grand. Pourtant, un jour, elle agresse avec une violence inouïe la
jeune femme qui lui propose son siège dans le métro.

1. POURQUOI ?

A quel moment réalise-t-on qu’on est devenu, aux yeux du monde, une personne âgée ?

Marie-Julie Baup, réalisatrice du film, a eu envie de raconter cette histoire, après avoir remarqué une altercation presque similaire (la violence ne fût que verbale) dans le métro. On pense d’abord, cette femme est folle. Et puis on a envie d’imaginer que non, pas du tout, mais qu’elle s’était juste sentie giflée par le temps qui passe. Et avait réagi comme elle pouvait.
Comment gérer la violence de sa propre déception à l’instant où cette information vous parvient comme un coup de poing ? En tant que femme. En tant que comédienne, ce thème touchait particulièrement notre réalisatrice.
Le personnage d’Anne est une femme épanouie. Il est important de comprendre qu’il ne s’agit absolument pas d’une femme atteinte psychologiquement. L’épisode du métro est un simple dérapage. C’est l’illustration de son hurlement intérieur au moment de l’adorable proposition.
Elle reprendra sa vie exactement comme avant, quelques minutes après cet incident. Mais avec cette monstrueuse petite douleur là. Bien cachée. Et tellement honteuse. Car c’est pourtant le cours des choses non ? C’est la petite histoire d’une violence anodine. Celle que nous avons vécu, vivons, ou vivrons forcément un jour. Plus ou moins bien...

2. MISE EN SCENE

Il est important d’être proche de la peau du personnage. Anne sera détaillée, scrutée. Au fur et à mesure la caméra pourra même devenir une sorte de juge. Impartiale. L’univers général sera clinique. Brut. La scène pivot du métro crue, réaliste, ultra violente. Elle doit être dérangeante même.
Parce qu’elle m’évoque depuis toujours la mort clinique, la couleur verte sera omniprésente. A travers des éléments de costumes. A travers des éléments de décors. A travers le traitement même de l’image en étalonnage.

3. UNIVERS SONORE

Le son est un personnage actif du film. Il est feutré et enrobant au démarrage de l’histoire, dans le caisson du studio de la maison de la radio. Puis les airpods prennent de plus en plus d’importance, masquant la réalité sonore. La voix cristalline de la jeune fille sera le liant entre la joyeuse illusion de la musique et le choc du bruit lourd du métro et des coups. Puis, le silence du quai. Et la vie qui doit reprendre son cours, comme si rien ne s’était passé. Le son devient l’encéphalogramme d’Anne.
Code Inconnu de Michael Haneke pourrait être une référence sonore dans l’idée.