Fabrication de la guerre civile est l'aboutissement d'une collaboration initiée entre l'auteur Charles Robinson, la comédienne Violette Pouzet-Roussel et les musiciens de Lena Circus.

Cette nouvelle forme succède à une dizaine de créations et d'expérimentations de formes et de dispositifs, réalisés depuis deux ans. C'est une forme à la fois légère et totale, abrasive et politique, singulière et généreuse.

Avec une production très légère, nous calons une entrée en studio pour dix jours de création. Sans co-production, nous comptons sur vous pour nous permettre de réaliser cette étape décisive, qui nous permettra de lancer la diffusion.

Nous avons tous lu ces articles qui, au lendemain d’une nuit de violences, évoquent des abstractions vagues et commodes : « jeunes des cités », « quartier sous tension », « délinquants bien connus des services de police », « taux de chômage au-dessus de la moyenne nationale ». Des abstractions qui renvoient vers les classes dangereuses ou vers les opprimés de la société.

Pourtant, un quartier qui s’embrase, comment ça commence en vrai ?

Voilà ce que nous essayons de comprendre, de produire, d’expérimenter : en textes, en voix, en musique. Créer pour la scène une ville sonore et crépitante, mouvementée, tragiquement humaine, et qui entre en fusion.

► Fabrication de la guerre civile se propose en concert et lave textuelle, landscape sonique et slogans urbains. Un récital de voix vivantes pour deux lecteurs, une vingtaine de personnages et trois musiciens. Une mécanique de précision sonore d’une heure tout rond.

• texte : Charles Robinson
• lecteurs : Violette Pouzet-Roussel - Charles Robinson
• création sonore : le trio Lena Circus

# UNE CITÉ EN COURS DE DÉMOLITION

Banlieue parisienne. Quartier des Oiseaux. Une cité fictive : La Cité des Pigeonniers.

Elle compte 322 appartements promis à une démolition prochaine. Soit 1.200 habitants, et autant d’histoires de familles, d’amitiés, d’amour, de destins tragiques ou cocasses, tendres ou cruels.

Par exemple :

• Les ambitions de Budda, entre boxe, championnat en Thaïlande, et les couches du petit dernier.
• La disparition subite de Bégum, après laquelle se lance GTA, son amoureux et enquêteur vaudou.
• Les projets de business créatif de l’entreprenant M, aux chevalières plein acier et aux mandales légendaires.
• Le chasseur Bambi, prédateur aux aguets. Ou encore Darling, l’adorable choupette à frange.

C'est dans ce territoire imaginaire que nous créons une nouvelle lecture live : Fabrication de la guerre civile.

# UN DISPOSITIF SCÉNIQUE

L’enjeu de cette nouvelle forme est de parvenir à concilier la puissance d’une création sonore aux guitares telluriques, aux polyrythmies sauvages, aux sons urbains modelés par l’électronique (sculpter les sons du chantier ou d'un RER), avec l’écoute d’un texte romanesque et polyphonique.

Atteindre une forme qui parle simultanément à la tête, au cœur et aux tripes.

Chaque tour, chaque artère, chaque allée, chaque gamin, chaque adulte, est un instrument, une note, une gamme, une matière sonore.

Charley des pots d’échappement débridés. Tom basse doux des crachats mentholés.

Les bâtiments sont les tuyaux d’un orgue géant, et, seul, d’une solitude sublime et quasiment divine, Mooz, dans sa chambre, étendu sur son lit, compose sur son ordinateur la bande-son du quartier : tissée de culture populaire, de beats et de rumeurs. Mooz est une méduse ! Un ensemble de fins filaments aux captations flottantes. Une méduse se colore des ambiances qu’elle happe, elle ne filtre pas : elle mixe.

Quand on lui demande de définir sa musique, Mooz se souvient que les critiques invoquent : le reggae version spleen, les basses plus lourdes que la disco, les pures syncopes hydrophoniques, le rap hardcore chicagoan, les danseuses en boxer argent qui descendent des étoiles, l’écriture polytonale inversée, le zouk bulgare interprété par des orphelines, Giuseppe Verdi enfin transcrit pour doom metal, le rock progressif allemand période machine, Tchaïkovski joué par des punks à Téhéran, la house réduite en musique de chambre et pour orchestre à cordes.

— C’est comme Mozart chanté par des dauphins si tu le chopes avec un sonar et que tu réencodes le signal grâce à un ordinateur trop puissant.

Cette forme invente aussi une scénographie qui emploie la vidéo pour fondre en un même corps mobile les deux lecteurs, les trois musiciens et leurs instruments.

# UNE NOUVELLE ÉTAPE DANS UN ENSEMBLE DE CRÉATIONS

Fabrication de la guerre civile est d'abord un roman, publié aux éditions du Seuil en 2016.

Mais le texte génère des créations multiples : telle cette grande forme de 9 heures de lecture (Nuit Blanche, 2015) pour deux voix, trois musiciens, quatre scripteurs et une église, que nous avions intitulée Râga nocturne. Soit 18 chapitres de trente minutes, 9 heures de musique improvisée et une scénographie favorisant l'immersion et la fusion avec l'architecture néo-classique de l'église Saint-Bernard (Paris).

Telles aussi des lectures à une ou deux voix, avec création sonore électronique, installation et vidéo :

• Bambi ne sera plus jamais comme les autres enfants (festival Hors Limites)
• Mister Weed (Silencio, Paris)
• Natural Born Losers (Nuit Remue)
• Lucie ou la hantise de l'employeur (festival Midiminuitpoésie, Nantes)
• Battling Budda (Maison de la Poésie, Paris)
• Ce qu'ils font dans les arbres (L'Attrape-couleurs, Lyon)

Etc.

# LE CALENDRIER

L'écriture du texte, la recherche de sons documentaires et la captation de field-recordings, la préparation vocale, ainsi que la préparation de l'instrumentation se dérouleront durant l'été.

La création en studio aura lieu en septembre 2016, et se déroulera sur une dizaine de jours.

Les lieux et dates de diffusion sont en cours de discussion et nous attendons les confirmations pour les annoncer. Au vu des contacts actuels, nous pouvons compter sur une dizaine de dates en France.

# LA PRESSE PARLE DE "FABRICATION DE LA GUERRE CIVILE" - ROMAN

« Étrangère et familière, à la fois orale et écrite, ni tout à fait celle des marges ni tout à fait celle du centre. Une langue souple et déréglée, inventée pour les besoins de cette fiction-là, capables d’associer des langues antagonistes, celles de la vie simple et de la vie violente. La langue est le vecteur de contamination de la guerre civile, l’outil de sa propulsion constante dans le texte jusqu’à l’explosion finale. »

--- Le Monde des Livres

« Homère de l’asphalte, Charles Robinson s’approprie ce dialecte indocile et sublime l’audace de cette voix qui mystifie les tensions immémoriales – "viol, traîtrises, vengeance" – et ouvre le nouveau chapitre de notre mythologie contemporaine. "À deux millénaires près nous serions tous dans la Bible. Vous nous adoreriez." Il n’est jamais trop tard. »

--- Les Inrockuptibles

# ENTRETIEN

Pourquoi les Cités ?

Pour la société française, les Cités sont un sujet de discours, qui – en caricaturant à peine – vont de la méfiance sécuritaire (face aux classes dangereuses) au témoignage compassionnel (les opprimés de la société). Dans les deux cas, on se satisfait très bien de ne pas fouiller trop avant et d’entretenir les liens les plus ténus avec ces lieux, ces êtres.

Dans toutes les formes que connaît le projet, il y a au contraire la volonté de passer du temps, de déployer, d’explorer, d’être là, au milieu. Non pas apporter un contre-discours, mais prendre les Cités comme lieu d’expériences. Forger un espace-temps où refaire connaissance. Rendre intensément vivant dans l’espace littéraire. La littérature peut offrir, en guise de connaissance du monde, une relative virginité des perceptions. Quand l’essentiel du discours sur les banlieues vise à les repousser au loin, les conserver hors de notre champ de connaissance, le texte prend ce territoire pour une mine riche d’histoires, une ressource pour l’imaginaire et le travail de la langue. Donc un espace désirable, en dépit de sa noirceur. Les Cités ne sont pas habituellement un lieu où nous sommes incités à la rêverie. C’est exactement cela que nous voulons réaliser : un territoire souple, fertile, multiple, pour les imaginaires et les sensibilités.

Pourquoi une forme mixte texte-voix-musique ?

Fabrication de la guerre civile est d’abord un projet romanesque. Une vaste fresque qui s’étend sur deux romans, 1.300 pages, une centaine de personnages, une vingtaine de récits principaux et de nombreuses situations ou micro-portraits. Cette écriture proliférante a très vite débordé les livres et s’est réorganisée presque naturellement dans des formes multiples. Une pièce radiophonique pour France Culture à partir de deux pages du roman, réécrites et amplifiées. Des lectures live avec bande-son électroniques ou dispositifs vidéo. Le Râga nocturne créé lors de la Nuit blanche appartient à cette veine des formes live : investissement d’un lieu par la densité électrique du texte et l’énergie des voix. Ici, il s’agit pleinement et joyeusement d’une grande forme, qui implique les trois musiciens de Lena Circus et quatre scripteurs qui vont écouter-transcrire en direct le texte tout au long de la nuit.

Dans cette nouvelle création, nous voulons jouer avec l’énergie du concert rock, tout en proposant un texte riche. La puissance sonore comme une sorte d’ouvre-boîte, pour déverrouiller nos assurances politiques et nos présupposés, et obtenir que le texte se déverse en chacun. Une création littéraire qui parle aux pieds, aux tripes, au cœur, à l’âme, dans un seul et même mouvement.

# POUR EN SAVOIR PLUS

Le mini-site du Râga nocturne créé lors de la Nuit Blanche : http://dans-les-cites-raga-nocturne.tumblr.com/

Les premières pages du roman : http://www.calameo.com/read/000274618205164ebf040

Le site de Charles Robinson : http://charles-robinson.blogspot.fr/

Le site bandcamp de Lena Circus : https://lenacircus.bandcamp.com/