Alphonse, une histoire d'amour

Alphonse, Une histoire d'amour

De Marie-Hélène Lafon.

Nouvelle extraite de Histoires, prix Goncourt de la nouvelle 2016, Editions Buchet Chastel

Du 6 au 22 juillet 2018 au Théâtre des Lila's, Avignon, à 15h

Production : Le Collectif des Fiers Désinvoltes (Grenoble)

Mise en scène et jeu : André Le Hir

Chargée de production : Marie-Christine Cuffolo

.

.

Alphonse, héros tragique, est mis à l'écart du monde agricole dans lequel il traîne sa "vie minuscule". "Retardé" avait dit le médecin. Pas vraiment un homme, pas une femme non plus dans un corps d'homme, il est relégué aux travaux de couture (qu'il aime, du reste), caché du regard des Autres. L'arrivée d 'Yvonne, bonne à tout faire, souillon promise aux eaux de vaisselle, penchée sur les buées des lessives sempiternelles et comme née d'elles, va bouleverser la vie d'Alphonse. Ils vont peu à peu se reconnaître, s'apprivoiser, s'aimer comme ils peuvent, comme ils savent, comme ils sentent.

Dans ce texte épique et bouleversant, Marie-Hélène Lafon donne la parole à ceux qui l'ont perdue, ou ne l'ont jamais eue, ou n'ont jamais pu ou su la prendre. De leur silence naît une parole poétique et théâtrale, de l'ordre du sacré peut-être...

Pourquoi porter ce texte au plateau ?

Dans mon parcours d’acteur et de metteur en scène, le texte est primordial. Les auteurs ( Beckett, Sarraute, Duras, Mauvignier) guident mes choix, suscitent mes désirs, mes nécessités de porter leurs écrits (leurs cris ?...) par mon corps et ma voix.

L’écriture de Marie-Hélène Lafon appelle l’oralité, la mise en voix, la mise en corps de l’écrit. Je l’ai pressenti tout de suite à la lecture de « Liturgie », son premier recueil de nouvelles dont est extrait « Alphonse ». Mon intuition a été confirmée par le très beau livre « Chantiers » sorti à l’automne 2015 dans lequel elle nous ouvre les portes de son atelier de création, où elle nous invite à son « établi » :

« La lecture à voix haute m’a été nécessaire dès « Liturgie », nécessaire pour ajuster la chose, phrase à phrase, mot à mot. Le corps dans l’écriture et le corps à corps dans l’écriture, c’est aussi cet exercice crucial et charnel de la lecture à voix haute. Je ne sais rien faire d’autre pour ajuster le tir verbal que dire et lire à voix haute, recommencer, relire et redire, et donc émettre le texte par le corps, avec lui, soumettre le texte au risque de l’air, de sa densité, le tendre, le pousser, l’ériger, le respirer, le humer, l’expectorer… »

Je ne sais pas si Marie-Hélène Lafon, quand elle écrit ça, a conscience qu’elle nous livre une véritable poétique de l’acteur, très concrète et éminemment exigeante !

Mais cette puissance qui pousse le texte vers la voix et le corps, la mise en chair du verbe, est paradoxale : l’univers (le terreau) d’inspiration de Marie-Hélène Lafon est le monde paysan dont elle est issue, où la parole, l’échange n’ont pas vocation à rendre compte de la poésie violente, subtile, de « la vie dans les plis » (Michaux), elle est souvent juste utilitaire. On parle peu dans ce milieu. Alors on parle par signes, regards, légers mouvement de corps, on parle par sensations, ressenti charnel dans la douceur ou la violence du contact de l’air, de la nature. Alphonse ne parle pas, et pourtant tout parle en lui, et de son silence le théâtre peut surgir, la parole théâtrale s’extrait, une parole de l’ordre du sacré et du sensible…

Marie-Hélène Lafon a assisté à une première étape de travail le 24 mars 2016 à la Libraire La Dérive (Grenoble), et a découvert, avec émotion, le spectacle dans son aboutissement le 20 novembre 2016 au Théâtre de Poche (Grenoble).

"C'est un homme debout, c'est un homme seul, vêtu de blanc ; les autres le cernent et son corps tient, il fait face. Il porte des mots, les mots d'une histoire de silence ; il les porte, il les incarne, les mots sortent de son corps et un monde se met à exister sur la scène. Un monde."

Marie-Hélène Lafon

"Dans un mimétisme fascinant, l'acteur incarne tout en douceur et sobriété le personnage reclus dans le silence, à la marge de l'agitation des autres, le jeu adhère à l'écriture âpre, réaliste, intime, rugueuse."

Le Dauphiné Libéré

Chaque don bénéficie d'une déduction fiscale de 66%.