A nos douleurs, une fresque familiale

Résumés des différents solos

Pierre ou le deuil d’un frère

Pierre est l’un de ces hommes sans histoire, au quotidien rangé, enfermé dans une routine qui le tue à petit feu. A première vue, il mène une existence banale, sans intérêt.

Mais plus il se raconte, plus ses souvenirs laissent entrevoir sa sensibilité ; dans cet océan de gris, des couleurs apparaissent. Ces couleurs, ce sont les moments passés avec son fils, Jérémie, qu’il aime profondément.

Seulement, quelque chose cloche.

Dans l’air plane une pesanteur écrasante, un vide qui attire inexorablement Pierre dans l’abîme. Pierre ou le deuil d’un frère, c’est un effondrement. L’histoire d’une chute insoutenable et interminable. Mais dans sa perte, cet homme va découvrir une chose bien plus précieuse que tout ce qu’il a connu auparavant. Lui-même.

« Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière. » Michel Audiard

Caïn ou la vengeance d’un père

Aujourd’hui c’est dimanche, Caïn bricole paisiblement dans son garage en écoutant France Culture. Tout est calme en cette fin de journée, et malgré le cliquetis de la pluie sur la fenêtre, on entend les mouches voler. Caïn est concentré.

Son atelier, c’est son terrier, son endroit rien qu’à lui. Interdit d’y entrer sans sa permission. C’est là qu’il peut être pleinement lui-même, sans filtres, alors il s’y retire dès qu’il le peut.

Dans son garage, Caïn fait toutes sortes de choses. Il répare le vélo de la fille de sa voisine, retape la tondeuse de son meilleur ami, repeint la voiture de collection de son fils… Servir les autres, il sait faire.

Seulement, depuis quelques temps, il est fatigué. Il est l’homme à qui on demande tout… mais à qui on ne donne rien. Trop bon, trop con, se répète-t-il en rongeant ses dents. Derrière le masque bienveillant de ce bon samaritain, la colère bouillonne, la souffrance suinte, et le vernis commence à craqueler. Aujourd’hui, la coupe est pleine, et le monstre qui sommeille en lui, assoiffé de justice et de reconnaissance, s’apprête à entrer en piste.

« Je me réveille un matin, et je les détruis. Tous. »

Henri ou le rêve de grand-père

S’il a vieilli, Henri n’a pas perdu son âme d’enfant. Bon vivant et joyeux luron, il nous invite dans son jardin pour rencontrer ses compagnonnes de voyage et meilleures amies, les fleurs.

Cette vie de jardinier, ce n’était pourtant pas celle dont il rêvait étant jeune. Lui, ce qu’il voulait par-dessus tout, c’est être clown. Seulement ses parents en ont décidé autrement.

Mais on a beau le chasser, le naturel revient toujours au galop : ce rêve a continué d’exister, et il l’incarne à travers cette bonhomie qui ne l’a pas quitté, malgré la dureté de son métier.

Le temps d’un après-midi, Henri nous partage son amour des tulipes, des bégonias et des pensées, amies qu’il arrose avec soin grâce à son arrosoir magique. Oui, magique ! Car il fait éclore la beauté.

Le projet artistique de la compagnie Corps espiègles

La Compagnie Corps espiègles a pour ambition de créer des univers singuliers et poétiques, et de faire vivre des expériences sensibles au public. Nous souhaitons lui proposer un théâtre intriguant, vivifiant et décalé, qui déplace son regard dans d’autres réalités, d’autres espace-temps, grâce à une recherche exigeante sur le jeu, le corps, et les espaces.

Ce qui nous motive, c’est de toucher au cœur, à l’essence de ce qui fait notre humanité. Renouer avec notre nature instinctive, pulsionnelle, irrationnelle. Les univers que nous souhaitons raconter sont traversés de figures troubles, créatures primaires, à la marge, inadaptées, comme pour réhabiliter ces parts de nous qui ne trouvent pas leur place dans nos sociétés.

Sortir des sentiers battus, en construire d’autres, questionner l’ancien, rêver du nouveau. Proposer un théâtre artistiquement exigeant, sincère, sensible, vrai, intimement relié à la vie. Cultiver le pas de côté, l’impolitesse, le pied de nez, et la joie d’être ensemble.

L’une des spécificités de la compagnie est de proposer un théâtre transdisciplinaire et protéiforme. Nos projets sont des mondes en soi, des univers hybrides, où les différents arts – théâtre, danse, arts plastiques… – se croisent et dialoguent entre eux ; c’est de leur somme que naît une narration, une poésie. Selon ce que chaque spectacle requiert, nous naviguons entre ces différents médias, sans préférence pour une forme plutôt qu’une autre, et sans nécessité non plus de toutes les faire intervenir. Néanmoins, le travail du corps en scène reste central dans notre démarche.

Nous envisageons le travail de création comme un espace laboratoire, sur l’interprétation comme sur les formes de représentation. Au plateau, nous recherchons des états de corps investis, incarnés, et ludiques, au service d’atmosphères sensibles ayant un vrai impact sur les spectateurs et spectatrices. Nous avons l’intuition que pour nous toucher, nous faire vibrer, créer de la pensée et de nouveaux imaginaires, le sens doit passer par les sens, la sensation, les corps. Sinon, pas de transformation possible.

Jouer est pour nous l’occasion d’une fête, d’un retour à la joie de l’enfance. Il est important pour nous d’allier exigence et virtuosité, au plaisir du jeu. Tous nos spectacles ne sont pas nécessairement joyeux, mais la joie reste au cœur du processus.

Enfin, nous portons une attention toute particulière au travail sur la scénographie, les costumes, les lumières et l’espace sonore, qui comme un écrin, viennent renforcer les univers poétiques de chaque création, leur donner un corps, une densité palpable. Toujours dans le but de faire vivre une expérience physique, sensitive et esthétique au public. Nous aimons quand le théâtre devient un art total, qui unit toutes les dimensions de la création pour faire spectacle, et nous souhaitons explorer toutes les possibilités qu’il nous offre pour créer du rêve, de l’imaginaire, de la beauté, de la liberté.

Les créateurs qui nous inspirent : Le Munstrum théâtre, Gisèle Vienne, Hofesh Shechter, Maguy Marin, Jean-François Sivadier, le Théâtre de l’Argument, et d’autres encore…